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Retrait préventif

Publié le 11 juin 2003 par Linda Vaillant, directrice générale

Révisée en novembre 2010

La Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) prévoit de façon spécifique le droit pour l’employée enceinte ou qui allaite, à des conditions de travail ne comportant pas de danger pour elle, à cause de sa grossesse, ou pour l'enfant à naître.

La pharmacienne qui considère que son travail comporte de tels dangers, doit fournir à son établissement un certificat médical attestant quels sont ces dangers et à partir de quel moment de la grossesse la pharmacienne doit cesser d'être exposée à de tels dangers. Ce certificat émis par son médecin traitant doit être confirmé par la Direction de la santé publique.

Dangers

L'établissement ne peut pas contester un certificat médical qui remplit les modalités prévues à la Loi et aux règlements. Son seul droit réside dans le fait de contester le retrait préventif en prouvant que, dans le cadre de son travail, la pharmacienne n'a pas à effectuer ladite tâche considérée comme étant dangereuse.

Par contre, la jurisprudence exige que le danger soit réel et vraisemblable, qu'il ne soit pas qu'une vague inquiétude ou qu'une simple hypothèse ne reposant sur aucun fondement.

Voici quelques exemples de dangers identifiés par la jurisprudence. 

RisquesExemples
risques physiquesagression par des patients agressifs
risques ergonomiquesmanipulation de charges lourdes en l'absence d'équipement approprié
risques biologiques ou infectieuxcontact avec des patients porteurs de maladie contagieuse sans que les moyens de prévention ne soient susceptibles de prévenir la contagion
risques chimiquesexposition aux rayons-X
risques diverstravail de nuit (y incluant les gardes de nuit) ou sur rotation

Malgré l'identification de ces dangers, il n'en demeure pas moins que ceux-ci ne seront pas nécessairement acceptés automatiquement, tout dépendant du degré d'exposition à ces risques et des possibilités d'éviter de telles expositions. Par exemple, il a déjà été décidé que le simple port de gants de latex était suffisant pour éviter la contagion et ce, même s'il était possible pour l'infirmière de se piquer avec la seringue dans sa manipulation. Il a également été décidé dans une autre cause que la pharmacienne avait la responsabilité d'aviser de sa présence le personnel concerné dans un département où il y a prise de rayons-X et qu'en conséquence, il n'y avait pas lieu d'accorder le retrait pour ce seul motif.

Réaffectation

L'effet de la remise de ce certificat est automatique, l'établissement est alors tenu de réaffecter la pharmacienne à un travail ne comportant pas les dangers ainsi identifiés, que ce soit à l'intérieur du même poste de travail mais modifié de façon à éliminer ces dangers, ou bien carrément à une autre affectation qui ne fait pas partie habituellement de sa charge de travail. Par exemple, la pharmacienne qui exerce sa profession en oncologie pourrait être réaffectée dans un autre centre d’activités.

En vertu de la LSST, la pharmacienne ne peut pas refuser d'effectuer une telle affectation pour la simple raison que celle-ci ne fait pas partie de son travail habituel ou de sa convention collective. Un refus pour ce motif entraînerait inévitablement la cessation des prestations par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST). D'ailleurs, durant cette affectation, la pharmacienne conserve tous les avantages liés à l'emploi avant son affectation. De plus, après son affectation, l'établissement est tenu de la réintégrer à son emploi antérieur, sans perte de droits ni d'avantages.

En conséquence de ce qui précède, la pharmacienne enceinte ou qui allaite ayant produit un certificat de retrait préventif devra effectuer le travail qui lui est ainsi assigné. À défaut de le faire, ses prestations pourraient être cessées.

Les seules exceptions à ce principe sont les suivantes :

  1. si la pharmacienne considère que cette nouvelle affectation comporte les mêmes dangers;
  2. si la pharmacienne considère que cette nouvelle affectation comporte de nouveaux dangers;
  3. si la pharmacienne considère qu'elle n'est pas raisonnablement en mesure d'accomplir cette affectation.

Si l'établissement n'est pas en mesure de réaffecter immédiatement la pharmacienne, celle-ci peut cesser de travailler jusqu'à ce que l'affectation lui soit confiée par l’établissement ou jusqu'à son accouchement. Elle recevra alors de son établissement son taux de salaire régulier pour les 5 premiers jours ouvrables de cessation de travail. Par la suite, elle recevra des indemnités de remplacement de revenu correspondant à 90% du revenu net qu'elle tire annuellement de son travail, jusqu'à un maximum assurable, ces indemnités étant exemptes d'impôts. Le maximum assurable pour l’année  2002 est de  52 500$. Les 14 premiers jours (suivant les 5 premiers jours déjà mentionnés) seront versés par l'établissement et par la suite, ce sera la CSST qui effectuera les paiements.

Contestation par la pharmacienne

Le processus de contestation varie selon laquelle des trois situations ci-haut mentionnées est présente.

  1. si la pharmacienne considère que cette nouvelle affectation comporte les mêmes dangers;

    Elle doit contester son affectation en faisant une demande à cet effet à la CSST qui devra rendre une décision sur cet aspect; la pharmacienne aura alors 30 jours pour demander la révision de cette décision. Elle pourra dans l'intervalle cesser de travailler si elle le souhaite, mais elle ne recevra de prestations de la CSST que si elle obtient gain de cause. L’Association accompagne ses membres dans ces dossiers. Pour obtenir du soutien, la pharmacienne doit contacter la conseillère juridique de l’A.P.E.S.

  2. si la pharmacienne considère que cette nouvelle affectation comporte de nouveaux dangers;

    Elle doit faire une nouvelle demande de retrait préventif en produisant un nouveau certificat médical de son médecin traitant attestant de ces nouveaux dangers pour ainsi réenclencher le processus.

  3. si la pharmacienne considère qu'elle n'est pas raisonnablement en mesure d'accomplir cette affectation.

    Elle devra alors s'adresser au comité de santé et de sécurité de l'établissement ou aux représentants en prévention de l'établissement ou, à défaut, directement à la CSST pour que celle-ci rende une décision sur cet aspect. Si elle n'est pas d'accord avec cette décision, elle aura 10 jours pour en demander la révision. On entend par ce critère, que la pharmacienne n'a pas la capacité physique, les aptitudes nécessaires, la formation requise ou toute autre raison du même ordre. À  ce niveau encore, la pharmacienne peut obtenir l’appui de l’A.P.E.S.

Entente relative aux conditions de travail des pharmaciens exerçant en établissement

Par ailleurs, l'Entente prévoit spécifiquement, à l'article 16.19, le droit de la pharmacienne à des conditions de travail ne comportant pas de danger pour elle en raison de sa grossesse et pour l'enfant à naître ou l'enfant qu'elle allaite, suite à des risques de maladie infectieuse ou à des risques physiques.

L'Entente prévoit que l'établissement doit informer l'A.P.E.S. dès le dépôt d'un certificat à cet effet. Dans les faits, cette clause est peu respectée. En cas de problème, un appel à l’Association est toujours le meilleur moyen de s’assurer que l’A.P.E.S. puisse intervenir au moment opportun.

Il est possible pour la pharmacienne d'échanger son poste avec celui d'un(e) autre pharmacien(ne), en autant que ce(cette) dernier(ière) y consente, que l'établissement soit d'accord et que l'un et l'autre répondent aux exigences normales de la tâche.

L'Entente prévoit également que la pharmacienne qui travaille régulièrement sur écran cathodique peut demander de réduire à un maximum de 2 heures par demi-journée son exposition à un tel écran et, si cette affectation est possible, l'établissement l'affecte alors pour le reste de son temps de travail à d'autres tâches qu'elle est raisonnablement en mesure d'accomplir.

Tant que ces affectations ne sont pas confiées par l’établissement, la pharmacienne a droit à un congé spécial dont les indemnités sont régies par la LSST tel que précédemment décrit. Elle a droit à une avance sur cette indemnité payable par l'établissement qu'elle devra par ailleurs rembourser à l'établissement si elle n'obtient pas gain de cause aux diverses instances prévues à la LSST.

À noter par ailleurs que l'Entente ne peut aucunement limiter les droits de la salariée prévus à la LSST qui est d'ordre public.

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